Neuf avions de chasse, cinq frégates de premier rang et, pour la première fois, des tirs de missiles de croisière navals : la France a mobilisé d'importants moyens pour frapper des "sites de production et de stockage d'armes chimiques" du régime syrien, aux côtés de ses alliés américain et britannique. Sur la centaine de missiles de croisière ayant visé la Syrie dans la nuit de vendredi à samedi, Paris en a tiré 12, selon les informations fournies par l'Elysée et le ministère des Armées.
Parmi eux, trois missiles de croisière navals MdCN, d'une portée de 1 000 km et d'une précision de l'ordre du métrique, ont été tirés par une frégate multimissions (FREMM). Une première pour la France, qui n'avait encore jamais utilisé cet armement en situation réelle. Paris rejoint ainsi le club fermé des pays disposant, comme les Etats-Unis ou la Grande-Bretagne, de missiles de croisière embarqués sur des bâtiments de guerre.
Les tirs français concentrés sur deux cibles
Au total, en Méditerranée, Paris a déployé trois FREMM (sur les cinq actuellement en service dans la Marine), une frégate anti sous-marine, une frégate anti-aérienne et un pétrolier ravitailleur. Côté aérien, la France a mobilisé cinq Rafale, quatre Mirage 2000-5 et deux avions de surveillance aérienne Awacs, qui ont décollé de France vendredi, accompagnés par cinq avions ravitailleurs. Les Rafale ont tiré 9 missiles Scalp (portée supérieure à 250 km), une demi-heure environ après la frégate.
Tous les tirs français se sont concentrés sur deux sites dans la région de Homs, l'un dédié au stockage et l'autre à la production d'armes chimiques, assure-t-on au ministère français des Armées. La France n'a pas participé aux frappes lancées dans la nuit contre une troisième cible près de Damas – un centre de recherche qualifié par Paris d'"élément-clé du programme clandestin" d'armement chimique syrien.
Source: France Info 2018/04/14
Tir depuis la Frégate Aquitaine cette nuit du 13 au 14 avril
L’on savait que la frégate multimissions (FREMM) Aquitaine se trouvait en Méditerranée orientale alors que se préparait une opération devant viser le régime syrien pour sa responsabilité présumée dans l’attaque chimique contre la ville de Douma, le 7 avril dernier. D’après la ministre des Armées, Florence Parly, ce navire a été rejoint par d’autres du même type.
« Des frégates multimissions, accompagnées de bâtiment de protection et de soutien, ont été déployées en mer Méditerranée. Dans le même temps un raid aérien est parti en début de nuit de plusieurs bases aériennes en France afin de rejoindre les côtes de la Syrie », a en effet affirmé la ministre, après une série de frappes contre le programme syrien d’armes chimiques, menées par la France, les États-Unis et le Royaume-Uni, dans la nuit du 13 au 14 avril. Et de préciser que « le principal centre de recherche » sur les armes chimiques syriennes et que deux autres sites ont été frappés » par ces moyens.
Cette opération aura donc été le baptême du feu pour le Missile de croisière naval (MdCN), mis en oeuvre par les quatre FREMM en service au sein de la Marine nationale. Ces navires emportent chaque 16 exemplaires de cette munition, développée par MBDA.
Tir d’un missile de croisière naval depuis une de nos frégates multimissions cette nuit en Méditerranée. Objectif : un site de production d’armes chimiques du régime syrien. pic.twitter.com/A4hO0EtkvQ
— Florence Parly (@florence_parly) 14 avril 2018
« Le missile de croisière naval (MdCN) vise à permettre la conduite d’opérations vers la terre en disposant d’une capacité de frappe dans la profondeur depuis les frégates multi-missions », explique le ministère des Armées.
Un premier lot de ces MdCN, dérivés du SCALP emportés par les Rafale et les Mirage 2000D, a été livré en février 2017. Au total, il était prévu d’en doter la Marine nationale de 150 exemplaires (dont 50 pour les futurs sous-marins nucléaire d’attaque de la classe Suffren) dans le cadre de la Loi de programmation militaire 2014-2019.
D’une longueur de 7 mètres (avec booster) et d’une masse de 1,4 tonnes, le MdCN peut voler à la vitesse de 1.000 km/h. Sa portée est estimée à plus de 1.000 km. Il est doté d’un système de ciblage GPS, et d’une centrale inertielle. Évoluant à très basse altitude, il utilise un autodirecteur infrarouge pour reconnaître sa cible et se guider vers elle avec une « précision métrique ».
Source : http://www.opex360.com/2018/04/14/
Armes de dissuasion :
Ces missiles sont aussi une arme de dissuasion. Ils sont pour l'heure très coûteux. La loi de finance de 2015 sur laquelle la commande de 150 missiles est enregistrée précise que le coût du programme s'élève à 1,153 milliard d'euros et que chaque missile a un coût unitaire de 2,86 millions d'euros. Ils coûtent donc deux fois plus cher que les Tomahawks américains dont le coût unitaire est de 1,87 million de dollars (1,5 million d'euros) selon rapport su Sénat Américain.
Ce qui n'est pas surprenant, le programme américain est beaucoup plus ancien (les missiles américains sont opérationnels depuis 1983 et utilisés depuis la guerre du Golfe de 1991), les missiles ont déjà été vendus à l'export (uniquement à la Grande-Bretagne jusqu'à présent).
Mais si le missile français n'a pas encore trouvé preneur à l'étranger, son emploi en opération pourra peut-être convaincre des pays de s'équiper. Le conflit en Syrie pourrait constituer une "vitrine" pour les MdCN. Car de nombreux pays ont montré par le passé des marques d'intérêt pour ce type d'arme. Les Pays-Bas et l'Espagne ont voulu acquérir des Tomahawk américains avant d'annuler leurs commandes en 2007 et 2009.
Et la Pologne qui souhaite renouveler sa flotte de sous-marins aurait prospecté du côté des Américains. Autant d'acquéreurs potentiels que la France ne souhaite pas voir filer de l'autre côté de l'Atlantique. Notamment la Pologne. La France qui est en concurrence avec les Allemands sur ce dossier pourrait remporter le morceau car les Polonais souhaitent que les sous-marins soient équipés de missiles de croisière. Une technologie que donc seule la France possède en Europe.
Source http://bfmbusiness.bfmtv.com
Source Photos : Ministère de la Défense